HTML/XML, le schisme?

 Le Monde Informatique      n°714 - 21 mars 1997

  SPRING INTERNET WORLD HTML/XML,le schisme?
  Cela commence comme une histoire banale.
  A l'occasion du Spring Internet World,
  Microsoft propose CDF, un protocole pour
  standardiser le «Push Model» qui s'empare
  du Net. Surprise: derrière ce protocole s'en
  cache un autre, XML, un nouveau langage de
  description de pages Web. Microsoft le
  soutient, Netscape préfère l'ignorer...
  En apparence, cela ressemble à
  une histoire déjà vécue, presque
  attendue. En apparence
  seulement. Sur le salon Spring
  Internet World de Los Angeles,
  c'est l'effervescence autour du
  Broadcast, encore appelé
  Webcast ou Netcast, des
  néologismes qui tous se réfèrent
  au même paradigme, celui de la
  diffusion automatique de contenu
  via l'Internet. Plus d'une
  trentaine de sociétés se disputent
  ce marché encore étroit de la
  «Web-diffusion». Avec un enjeu
  clairement identifié: pouvoir
  proposer à des annonceurs des
  audiences larges et qualifiées.
  Même si, techniquement, les
  solutions de Broadcast sont peu
  novatrices, elles diffèrent. Bref,
  il y a là une énergie à canaliser et
  un mouvement à formaliser. Ne
  manque qu'un grand
  ordonnateur.
                               Les atouts de XML
                               Initié par des acteurs de la
                               communauté SGML, XML
                               (voir LMI n°711), comparé à
                               HTML, offre de grandes
                               possibilités de structuration. Un
                               document XML peut
                               notamment définir sa propre
                               grammaire, autrement dit sa
                               hiérarchie interne (d'où le
                               «Extensible» de XML). En
                               interprétant cette hiérarchie, une
                               application ou un agent
                               intelligent extraira du document
                               une vue qui correspond à un
                               profil utilisateur. Des fonctions
                               utiles pour l'intranet
                               documentaire mais aussi pour la
                               Web-diffusion. Voilà pourquoi
                               CDF, la proposition de
                               Microsoft pour standardiser le
                               broadcast, n'est pas autre chose
                               qu'une application XML.
                               Celle-ci définit entre autres la
                               structure d'un canal de
                               diffusion, ses mots clefs, son
                               cycle d'actualisation, etc.

                    Netscape absent
  Sans surprise, Microsoft s'octroie le rôle et annonce, à
  l'occasion du salon et avec le soutien d'une trentaine de sociétés,
  CDF (pour Channel Data Format). Un protocole proposé par la
  firme de Seattle au World Wide Web Consortium (W3C) pour
  standardiser la diffusion d'informations via le Web. Une
  man¦uvre bien maîtrisée. Microsoft, comme à l'habitude,
  profite du désordre ambiant et d'un fort engouement autour
  d'une technologie pour glisser sa solution. Celle qui, dans le cas
  présent, sera intégrée dans la prochaine version de l'Internet
  Explorer. Cette histoire pourrait s'achever ici avec cette fin
  classique. Mais un coup d'¦il sur les spécifications de CDF
  révèle que ce protocole s'appuie sur XML et non HTML, le
  langage de description de pages Web. Une caractéristique pas
  vraiment mise en valeur dans les communications de
  Microsoft...
  XML (pour Extensible Markup Language) constitue, à l'instar
  de HTML, un langage de description de pages adapté au Web.
  Un groupe de travail du W3C travaille d'ailleurs sur ses
  spécifications. Preuve que HTML n'est plus envisagé comme le
  seul langage possible pour la description de documents sur le
  Web. Plusieurs sociétés semblent avoir très vite saisi l'intérêt=
 de
  XML: Microsoft, bien sûr, qui compte l'intégrer dans Internet
  Explorer. Mais aussi Softquad, NCSA, Hewlett-Packard ou
  encore Sun. En revanche, Netscape manque à l'appel. Plus
  surprenant encore, les responsables de la société de Mountain
  View affichent ne pas se soucier de XML. «S'il s'agit de mieux
  structurer les documents, on peut très bien enrichir HTML»,
  affirme Mike McCue, responsable des technologies avancées
  chez Netscape. Un argumentaire qui est aussi celui de Marc
  Andreessen, vice-président de Netscape, vis-à-vis de CDF
  (lire l'interview ci-dessous). Compte-t-on vraiment chez
  Netscape ignorer XML au seul profit de HTML? Ou s'agit-il
  d'un coup de bluff, le temps d'organiser la riposte? Une chose
  est sûre: un chantier majeur s'est ouvert sur le terrain de la
  standardisation du Web et, pour la première fois, Netscape n'y
  participe pas.
                                      CYRIL DHÉNIN


           MARC ANDREESSEN,
      SENIOR VICE-PRESIDENT DE
                 NETSCAPE,
           RESPONSABLE DE LA
               TECHNOLOGIE
          «Je ne vois pas
    l'intérêt de ce CDF»
  L'une des grandes vedettes du Spring Internet
  World fut le Webcasting. Et Microsoft vient
  de soumettre au W3C une proposition de
  standard, CDF (pour Channel Data Format).
  L'adopterez-vous si le W3C l'entérine?
  MARC ANDREESSEN: Franchement, je ne vois
  pas l'intérêt de ce CDF. Le Webcasting est un
  complément du Web. Il ne va pas le remplacer, mais se
  combiner avec lui. D'autant plus qu'il peut être mis en
  ¦uvre avec les mêmes protocoles. C'est-à-dire en
  utilisant HTML, HTTP, Java ou le courrier
  électronique. Inutile donc d'inventer un nouveau
  protocole...

  Parmi les protocoles qui sont actuellement
  discutés au sein du World Wide Web
  Consortium (W3C) on trouve XML, un
  langage de description de document soutenu
  entre autres par Microsoft. Pourquoi Netscape
  ne participe pas à ses travaux?
  M.A.: «XML»?... Cela sonne très propriétaire, non?
  (sourire) Ne perdons pas de vue qu'un standard Internet
  est un protocole qui a suscité un consensus au sein
  d'institutions comme le W3C, l'IETF ou encore
  l'ECMA qui travaille sur Javascript. Le reste n'est que
  proposition...

  Java représente l'un des grands choix
  technologiques de Netscape. Pourtant, côté
  performances, le langage semble encore limité
  lorsqu'il s'agit d'exploiter des applications
  entières et pas seulement des appliquettes. Le
  remède sera-t-il logiciel ou matériel?
  M.A.: Je pense qu'il faut encore deux ou trois ans de
  travail avant que l'environnement logiciel donne
  satisfaction pour de grosses applications complètement
  écrites en Java. D'ici là, toute une gamme de machines
  dotées de puces Java vont arriver sur le marché. Elles
  apporteront déjà un autre niveau de performances.

  Lors du salon, Netscape a placé l'extranet au
  c¦ur de ses présentations. Pouvez-vous
  expliquer ce que recouvre cette expression?
  M.A.: Il s'agit pour une entreprise d'étendre son
  intranet aussi bien à ses clients qu'à ses fournisseurs.
  Afin de développer des services pour les premiers et,
  par exemple, de réduire les délais avec les seconds.
  L'extranet est donc une suite naturelle de l'intranet.
  Puisque les entreprises construisent leurs réseaux en
  s'appuyant sur les standards de l'Internet, leur
  interconnexion n'est plus problématique.
              Propos recueillis par CYRIL DHÉNIN

Received on Friday, 21 March 1997 15:08:09 UTC